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16 décembre 2009 3 16 /12 /décembre /2009 22:52


Une idée sympa et originale... peut-être ?

Perso j'adore les "vrais" sapins de Noël, ceux qui enbaument la maison et piquent les doigts quand on les décore. Je déteste ces machins en plastoque moches et super chers censés les remplacer. Mais c'est vrai qu'en même temps, l'idée d'acheter un arbre abattu rien que pour mon bon plaisir - un plaisir qui durera maximum trois semaines ! -, et puis de virer son squelette presque nu sans autre forme de procès après avoir bien bamboché autour de son cadavre, j'ai de plus en plus de mal chaque année :-(
Et puis ces centaines de milliers (ça frise le million en Belgique paraît-il) de sapins brûlés chaque année en janvier, même si ça alimente les traditionnels "grands feux" villageois de février/mars, c'est pas l'idéal.

On a bien déjà essayé les sapins avec motte à replanter, mais n'ayant probablement ni la bonne technique, ni le terrain adapté, ça n'a jamais vraiment donné de résultat. Ils mourraient quand même. Je pense que le fait qu'on taille les racines de manière beaucoup trop drastique pour leur permettre de reprendre, mais ce n'est qu'une supposition.

Bref, pas facile de concilier ses convictions et des traditions auxquelles ont tient malgré tout. À Noël, on a déjà viré les emballages cadeaux, les cadeaux ultra commerciaux et tout le bataclan, mais y a rien à faire, certaines choses sont plus tenaces et plus difficiles à éradiquer, je l'avoue. Et le sapin est un bastion auquel nous restons attachés, d'autant que j'aime son côté "païen" justement. Alors que faire pour être cohérent ?

Peut-être ceci constitue-t-il une solution :

Une ASBL  de la province d'Anvers propose tout simplement... d'adopter un sapin le temps des fêtes, et puis de le rendre à la nature ! Pour 40 € (la première année) et 20 € les années suivants, on se fait livrer un épicéa (taille au choix parmi plusieurs possibilités) avec sa motte et son contenant. On fait connaissance avec, on le décore, on l'intègre à la famille, on en profite... et après la période de fêtes, l'ASBL vient reprendre le sapin en question et le replanter sur son lieu d'origine. Ces sapins sont de plus élevés de façon tout à fait "bio", sans rien qui puisse nuire à l'environnement. C'est pas mal, non ?

Mais il y a mieux : on peut réadopter "son" sapin d'une année sur l'autre ! Oui, oui, vous avez bien lu. Chaque arbre est référencé et peut être retrouvé l'année suivante. Ca veut dire que, chaque année pendant 4 ans, on aura le même individu qui viendra partager notre vie de famille pendant quelques semaines, et puis retournera chez lui le reste de l'année. Avouez que c'est un peu magique, non ? :-)
Après 4 ans, malheureusement, les racines et donc la motte deviennent vraiment trop imposants pour pouvoir encore voyager.
Et que devient-il alors ? Malheureusement, apparement il n'est pas replanté une dernière fois pour poursuivre sa vie. Il est broyé pour servir de "nourriture" aux jeunes arbres. Ok, c'est écologique, mais c'est tout de même un peu tristounet. Je m'imagine très bien pleurer le jour du départ de "mon" sapin que je connais depuis quatre ans :-(

Picea glauca 970107 15
Reste la pierre d'achoppement au niveau de la logique écologique de ce projet : le transport des arbres en camion, qui pollue (on a l'aller, mais on a le retour aussi). Il semblerait que la société en question ait en projet des camions électriques. À suivre.

Alors, vraie innovation respectueuse des arbres, ou une nouvelle manière de surfer sur la vague écologique ? A vous de juger.

En attendant, si jamais ça vous dit de devenir "famille d'accueil" pour un épicéa gentil, sociable, propre (ben oui, il perdra nettement moins ses aiguilles, forcément !) et pas farouche, il paraît que la société a déjà enregistré cette année plus de 600 commandes.

Leur site est pour le moment exclusivement en néerlandais  : http://www.bloggen.be/champwell/

Pour commander :

CHAMPWELL
BioPromo vzw
Kloosterbaan 70/1
B-2370 Arendonk

014 770 297
0486 795 815

champwell@telenet.be



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24 juin 2009 3 24 /06 /juin /2009 20:52

Un chouette site que je viens de découvrir avec  mes gosses ce mois-ci, qui vulgarise tout un tas de concepts écologiques, à travers de petites animations vidéo, des dossiers informatifs, des "trucs", le fameux jeu "Clim'City", et plein d'autres choses...

Un site vivant, coloré, et qui donne envie aux enfants de comprendre, de participer... sans les abrutir. Chouette initiative je trouve.

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8 octobre 2008 3 08 /10 /octobre /2008 12:22

Quelques pas dans la bonne direction ...

Après le vote, le 19 juin dernier,  du "décret relatif à la coexistence des cultures génétiquement modifiées avec les cultures conventionnelles et les cultures biologiques", visant à rendre de plus en plus difficile la culture d'OGM sur le sol wallon, voilà que la Wallonie annonce sa décision d'entrer dans le "Réseau européen des Régions sans OGM" et de ratifier la charte de Florence.

Elle rejoindra en cela les 174 régions européennes, comprenant plus de 4500 municipalités, ayant décidé de faire partie ce de réseau à ce jour, et ce nombre est en augmentation constante (pour avoir une idée de la progression, les régions signataires de la chartes n'étaient que 20 en 2005 ... !)

Ces pionniers étaient sont :

 Regione Toscana (Italie)
 Land Oberosterreich (Autriche)
 Regione Marche (Italie)
 Région Aquitaine (France)
 Regione Lazio (Italie)
 Région Bretagne (France)
 Región Euskadi (Espagne)
 the Region Wales (Royaume-Uni)
 Région Ile de France (France)
 Région Poitou-Charentes (France)
 the Highlands and Islands Region (Royaume-Uni)
 Land Schleswig Holstein (Allemagne)
 Région Limousin (France)
 Regione Emilia Romagna (Italie)
 Land Burgenland (Autriche)
 Land Steiermark (Autriche)
 Regione Sardegna (Italie)
 Région Drama-Kavala-Xanthi (Grèce)
 Provincia Autonoma di Bolzano (Italie)
 Land Salzburg (Autriche)


Symboliquement, c'est déjà une belle avancée.

Mais concrètement, qu'est-ce que cela signifie ?

Cela veut dire que, dans les limites de leurs compétences et de leurs obligations envers les lois communautaires, les régions et autorités territoriales signataires s'engagent notamment et en très résumé à :

- promouvoir la mise en oeuvre au niveau régional de plans spécifiques et/ou de règles techniques, avec la possibilité de prévoir une protection des cultures traditionnelles ou biologiques contre les OGM sur de vastes étendues ou toute une région ;

- protéger d’une possible contamination génétique des territoires agricoles dont la production repose sur des normes de qualité - tels que les produits d’origine contrôlée et biologiques - ainsi que des territoires qui sont actuellement sujets à des règles européennes, nationales ou régionales de protection et de contraintes spéciales visant à protéger la biodiversité, des produits locaux spécifiques, le patrimoine naturel, en empêchant ou décourageant la culture des OGM dans ces zones ;

- soutenir, le principe selon lequel les semences pour la reproduction sont techniquement garanties "sans OGM" ;

- promouvoir la conclusion d’accords internationaux dans le but de garantir l’approvisionnement en matières premières de haute qualité, certifiées "sans OGM" ;

- protéger la biodiversité des Régions au moyen de mesures encourageant l’enregistrement de variétés et espèces locales dans les catalogues de conservation de la biodiversité et d’utiliser ces espèces dans l’industrie agricole pour empêcher que ce patrimoine ne soit breveté ;


Pour plus d'infos sur les points de cette charte ainsi que leur portée  :
http://www.gmo-free-regions.org/
http://www.infogm.org/spip.php?article2256
http://www.amisdelaterre.org/article.php3?id_article=1340
http://www.natpro.be/
http://lutgen.wallonie.be/spip/spip.php?article559

Moi je dis bravo à Monsieur Lutgen pour son dynamisme dans l'exécution de sa fonction.
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14 octobre 2005 5 14 /10 /octobre /2005 00:00
Par Philippe Lamotte.
Source : Le Vif L'Express du 7 au 13 octobre 2005

Le WWF a testé la présence de produits toxiques chez trois générations de femmes. Le but: peser sur " Reach ", un énorme projet de réforme lié aux produits chimiques dans notre environnement.

 

Le 11 octobre prochain, une rencontre insolite se déroulera au Parlement européen, à Bruxelles. Treize familles venues de toute l'Europe - uniquement des femmes et leurs filles - y rencontreront les élus pour les sensibiliser à la pollution chimique qui, depuis au moins deux générations, s'est glissée dans leur sang. Après avoir démontré l'ampleur de cette contamination chez des scientifiques et des personnalités politiques, le World Wide Fund for Nature (WWF) s'est, cette fois, penché sur la présence d'une multitude de produits toxiques chez l'homme de la rue. Ou plutôt chez la femme, histoire de bien taper sur le clou: dès la grossesse, les mères intoxiquent leurs enfants via le cordon ombilical.
Le but ultime de l'association au panda est d'infléchir le cours de "Reach": un surnom donné à un énorme travail d'évaIuation des risques pour la santé et l'environnement de 30000 produits chimiques en circulation. Ceux-ci existent partout (meubles, tapis, vêtements, détergents, parfums, emballages, etc.). Or, pour la plupart d'entre eux, on ne dispose que de très peu de données (éco)toxicologiques.
Qu'ont-elles dans leur sang, ces grands-mères, ces mères et leurs (petites) filles ?
" Une série de produits qui n' ont jamais été conçus pour se retrouver dans le corps", répond Nicolas van Larebeke, conseiller scientifique du WWF. Passons sur la présence de dioxines ou de produits désormais interdits chez nous, comme les PCB ou le pesticide DDT. Le WWF en a retrouvé chez tous les sujets, mais un peu moins chez les fillettes. Bonne nouvelle?  Peut-être, mais ces poisons continuent à être ingérés via les produits cultivés ailleurs. De plus, des produits d'apparition plus récente ont été plus souvent détectés, et à des taux plus élevés, dans le sang des jeunes générations que chez les aînés: des retardateurs de flammes au brome, des produits perfluorés (antitaches) et des muscs synthétiques ( parfums, etc.) "Chez les fœtus et les jeunes enfants, c'est le moment de l'exposition qui compte, plus que la durée." Depuis octobre 2003, des ONG comme Greenpeace et le WWF bataillent ferme pour réglementer la présence de tels produits sur le marché et pour leur trouver des substituts moins dangereux, comme le souhaite d'ailleurs la Commission européenne, initiatrice de la réforme. Au printemps dernier, une étude du bureau KPMG a nettement réduit la portée des appréhensions de l'industrie chimique qui, pour contester la réforme, brandissait le spectre de coûts faramineux et de délocalisations massives. Cet automne sera décisif. Puissamment représentée à la Commission, la chimie réclame diverses formes d'assouplissement lors de la phase d'enregistrement des produits. Il est question, notamment, de supprimer des tests pour les yeux et la peau, jugés superflus ou trop chers pour les PME. De même, la commercialisation de produits dangereux serait tolérée si leurs risques sont correctement " maîtrisés ", selon un des 1500 (!) amendements en négociation.

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10 octobre 2005 1 10 /10 /octobre /2005 00:00
30 septembre 2005


Certes, la catastrophe productiviste ne se serait pas produite sans les producteurs que nous sommes, par leur travail contraint, souvent servile. Nous avons trop tergiversé entre les « grands soirs » qui devaient se coucher sur une grève générale et les « ouvertures nocturnes » des temples de la consommation factice !

Source :  solidaritéS, 17 septembre 2005.


Les données relatives à l’évolution de la fréquence des cyclones destructeurs ont été publiées, suite aux catastrophes provoquées par Erika et Rita (1). Ni le nombre annuel de cyclones dans le monde, ni leur durée, ni la vitesse des vents n’ont varié, cependant leur intensité a plus que décuplé au cours des dernières décennies. Cette évolution est aussi caractéristique de l’augmentation du nombre de catastrophes naturelles dans le monde et des pertes qui en découlent. La courbe exponentielle de leur évolution au cours des dernières années suit celle, tout aussi exponentielle, du pillage des ressources naturelles, de la masse de marchandises, de déchets et de pollutions que ce mode de production engendre. Cette tendance n’est plus constante, ni graduelle mais explosive : elle s’emballe et s’élance vers des limites jamais atteintes dans l’histoire humaine. Son issue ne peut être qu’une chute...


La croissance exponentielle - « explonentielle » pourrait-on dire - de la production pouvait jadis s’expliquer par la demande d’une population mondiale en augmentation. Mais cette interprétation est infirmée, d’une part, parce que la croissance démographique n’a pas été exponentielle : elle tendra d’ailleurs à plafonner vers 8 milliards d’êtres humains aux cours des prochaines décennies, avant de fléchir lentement (2) . D’autre part, parce que malgré l’emballement productif, la satisfaction des besoins vitaux des populations est en régression. Preuve en est, qu’un tiers des êtres humains manque d’électricité, ou qu’une personne sur cinq n’a pas accès à l’eau potable. Ceci, alors que les consommations mondiales d’énergie (voir graphe 1) et d’eau explosent. Il en va de même de l’accumulation de richesses, alors que près de la moitié des êtres humains vivent au-dessous du seuil de pauvreté (3).



Accumulation privée et productivisme

La symbiose entre accumulation privée et productivisme apparaît avec le capitalisme. Cependant, l’année 1945 marque symboliquement une inexorable accélération : une fuite en avant conduisant à un point de non retour. Cette année a été celle du massacre par les Etats-Unis de 200000 civils - deux fois plus en sont morts depuis - à Hiroshima et Nagasaki, horreur qui faisait dire à Albert Camus : « La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l’utilisation intelligente des conquêtes scientifiques » (4) . Or ce choix n’a pas été fait et le « suicide collectif » menace plus que jamais.

La tendance exponentielle est caractéristique de ce qu’il convient d’appeler le « productivisme », ce « système d’organisation de la vie économique dans lequel la production, la productivité, sont données comme l’objectif essentiel » (5). C’est une combinaison organique entre, d’un côté, l’accroissement des richesses et, de l’autre, la réduction des biens utiles. Alors que le nombre de milliardaires ne cesse d’augmenter, 2.7 milliards d’humains vivent au-dessous du seuil de pauvreté, et un enfant sur trois souffre de malnutrition.


Vers un épuisement des ressources ?

La crise énergétique actuelle résulte de la priorité donnée aux ressources fossiles, au détriment des énergies renouvelables abondantes. Elle est la manifestation la plus tangible et récente d’une crise globale du procès de production capitaliste. Cette crise affecte plusieurs conditions nécessaires à la vie : la dépendance croissante des humains envers des ressources essentielles, mais non renouvelables, leur raréfaction consécutive (voir graphe 2), l’émission de gaz à effet de serre, le réchauffement climatique qui en résulte et, plus grave, l’absence d’alternatives énergétiques crédibles à ces combustibles.

L’étude de cette crise énergétique permet de mieux comprendre le choix productif absurde qu’a fait le capital, il y a deux siècles. Cette crise montre - ce qui est nouveau pour la gauche anti-capitaliste - que son projet de transformation sociale doit inclure dorénavant un projet de transformation du procès de production dominant en vigueur, projet que les révolutions passées n’ont su réaliser.

Certes l’épuisement des gisements fossiles est l’inquiétude du moment. Mais la plupart des autres intrants suivent une même tendance vers une irrémédiable raréfaction. L’augmentation de l’extraction de bauxite, minerai à la base de l’aluminium, par exemple, suit la même courbe folle que toutes les autres ressources minérales, dont le pillage aboutira, d’ici une vingtaine d’années à l’épuisement de cinq métaux essentiels. Il en va de même de l’eau douce, des surfaces cultivables, des forêts et de la biodiversité...



Dégradation du milieu vital

L’évolution de la dégradation du milieu vital suit la même tendance exponentielle, mais s’est décalée d’un temps de latence de quelques décennies, soit de la durée nécessaire aux émissions polluantes pour exercer leurs ravages sur la santé des espèces vivantes, la vigueur de la nature et la qualité de l’atmosphère terrestre.

Si l’effet de serre est l’objet présent des inquiétudes, bien d’autres bombes à retardement, à mèches plus lentes certes, sont à prévoir. Si nous ne subissons qu’aujourd’hui les ravages de l’amiante, c’est que les pathologies qu’il engendre tardent plusieurs décennies avant de se manifester : les 50000 à 100000 morts attendus en France, jusqu’en 2030 résultent de la consommation exponentielle d’amiante depuis l’après-guerre. Les effets des milliers d’autres substances cancerogènes et toxiques, produites massivement depuis les trente glorieuses, manifesteront leurs effets plus tardivement, mais sûrement.


Croissance contre humanité

Les courbes de l’évolution de la production de marchandises divergent de celles de la satisfaction des besoins et de l’amélioration des conditions de vie des êtres humains. Les premières s’emballent alors que les secondes stagnent ou décroissent. Cet écart entre production et satisfaction se retrouve dans l’accès des populations aux ressources qu’elles détiennent et aux richesses qu’elles produisent.

L’espérance de vie est un bon indicateur de ces inégalités, car elle dépend principalement des disponibilités en ressources et services, qu’ils soient du ressort de l’alimentation, des soins médicaux ou de l’habitat, dont on estime que la rareté ou l’insalubrité provoque annuellement 2,2 millions de décès. L’espérance de vie va du simple au double, selon les pays, et les écarts se creusent entre classes sociales d’un même pays. Par exemple, en Zambie, où l’espérance de vie est de 37 ans, alors qu’elle pourrait atteindre le double, c’est comme si la moitié des habitants étaient décimés.

Les tendances exponentielles ne peuvent qu’aboutir à une chute. Pour la rendre moins dure aux générations futures, il n’y a plus rien à attendre du capital qui, obnubilé par ses profits immédiats, ne manifeste pas la moindre intention d’inverser la tendance. Pour ce qui est de la sortie de l’énergie fossile, on comprend bien que les cinq « majors » - Exxon-Mobil, Shell-BP, Total, Chevron-Texaco - dont les bénéfices nets s’élevaient à 65 milliards d’euros en 2004, ne veuillent pas tuer la poule aux œufs d’or... noir pour épargner la Planète ! (6)


Espérer pour agir

Pas d’espoir non plus par rapport au développement d’alternatives énergétiques : les prévisions de l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) pour 2030 sont claires : la demande d’énergie augmentera de 59% et l’énergie fossile couvrira le 85% des besoins mondiaux ; les énergies renouvelables resteront marginales avec 2% ! (7) Quant à une sortie de crise par la « décroissance », si elle était encore envisageable après guerre, un demi-siècle de dégâts ont rendu cette option obsolète. En effet, il est vain de freiner et de faire reculer un bolide fou qui va droit dans le mur et s’y trouve déjà à moitié embouti !

Alors il ne reste plus qu’à compter sur les milliards d’êtres humains pour qui le « Progrès », promis jadis par le capitalisme, ne soit pas que sang et larmes. Certes, la catastrophe productiviste ne se serait pas produite sans les producteurs que nous sommes, par leur travail contraint, souvent servile. Nous avons trop tergiversé entre les « grands soirs » qui devaient se coucher sur une grève générale et les « ouvertures nocturnes » des temples de la consommation factice !

Il faudra se remettre à espérer, même si l’aube radieuse s’annonce plus que jamais incertaine. Quoi qu’il en soit, nous n’avons plus le choix, car « cette crise ne nous quittera pas, aussi longtemps que les hommes n’auront pas inventé des formes sociales nouvelles, un mode de développement des techniques énergétiques et d’utilisation de la force de travail humaine affranchis des lois de l’accumulation du capital » .

François Iselin


-  Source : solidaritéS N° 74 www.solidarites.ch/journal

(1) Le Monde du 19 septembre 2005, à propos de l’étude parue dans Science du 16 septembre 2005.

(2) Isaac Johsua, Le Grand tournant, Paris, PUF, 2003, p. 24.

(3) Riccardo Pétrella, Le Monde Diplomatique, août 2005.

(4) Albert Camus, Article d’actualité paru dans le journal Combat, cité par Le Courrier des 6-7-8 août 2005.

(5) Le Petit Robert.

(6) Le Monde, 19 février 2005.

(7) Rapport de l’AIE publié le 26.10.2004. Le Monde du 28.10.04

(8) J.-C. Debeir, J-P. Deléage, D. Hémery, Les servitudes de la puissance, Flammarion, 1986, p. 378.

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30 septembre 2005 5 30 /09 /septembre /2005 00:00
Source : magazine test-achats. n° 491. octobre 2005

LA FILIERE DU CACAO : Des feves au gout amer

Par X. Debourse et C. Rousseau

 
Derrière les beaux clichés et les récits alléchants sur la fabrication du chocolat,la réalité est souvent moins douce pour les producteurs locaux. et les entreprises du secteur n'aiment visiblement pas que l'on aborde cet aspect des choses.

 
Qui dit cacao, dit bien sûr chocolat. Mais les fèves tropicales ne servent pas qu'à cela. Au total, leur production fait vivre directement près de 20 millions de personnes, principalement en Afrique occidentale, et elle représente jusqu'à 30, 40 voire plus de 50% des recettes d'exportations dans certains pays comme le Ghana, la Côte d'Ivoire ou le Cameroun....

Plus de 90% de cette production s'effectue dans des petites plantations de moins de 5 hectares, dont les exploitants sont très dépendants pour leur survie, car la diversification des activités reste plutôt l'exception. La grande instabilité des prix internationaux des matières premières accroît leur préarité et entraîne des effets néfastes.

 

Enfants, biodiversité et pesticides

 
* Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), l'emploi d'enfants - main-d'oeuvre bon marché et malléable - est l'une des principales conséquences de l'instabilité des prix payés aux producteurs et plus particulièrement de la pression constante du marché pour les diminuer. Cependant le phénomène est particulièrement marqué dans le secteur du cacao, où l'on a même rapporté des cas d'esclavage d'enfants.

*  La culture traditionnelle du cacaoyer s'effectue sur des petites plantations à couvert dans les forêts tropicales. Il s'agit dès lors d'un type d'exploitation qui préserve l'habitat de nombreuses espèces animales et favorise le maintien de la biodiversité. Toutefois on assiste depuis plusieurs années au développement de méthodes de production intensive, qui nuisent à la biodiversité.

*  La fragilité relative des cacaoyers pourrait amener les exploitants à protéger les cultures à coups de pesticides. Mais vu la faiblesse des prix du cacao, rares sont ceux qui peuvent se permettre d'acheter des pesticides. Par ailleurs, ceux qui en utilisent savent rarement comment le faire à bon escient, entraînant un risque d'emploi excessif et de pollution.

 
* Enfin, on assiste à un développement de cultures massives à découvert (notamment en Indonésie), plus aisées, plus rentables mais qui entraînent la déforestation et l'emploi systématique de pesticides. Qui plus est, le cacao ainsi obtenu est de moindre saveur que le cacao cultivé à CoUvert.

 
Secteur interpellé mais opaque

 
Poussé par l'opinion publique, le secteur du cacao a voulu apporter sa réponse au problème en créant une fondation, un protocole et un programme de certification du secteur à l'échelle des pays producteurs visant à éradiquer le travail forcé des enfants. Cette initiative, lancée il y a quatre ans, a notamment fait pression sur les gouvernements des états d'Afrique occidentale mais à ce jour les résultats sont si faibles que les organisations non gouvernementales soupçonnent en fait le secteur de vouloir reporter le problème sur les seules autorités nationales voire sur... l'Organisation internationale du travail. Du côté des entreprises productrices, rares sont celles qui participent de façon directe au programme de certification et aucune ne peut garantir que leur chaîne de production, faute de transparence et de contrôle, soit exempte de travail des enfants. On peut dès lors se demander si ce problème est réellement pris au sérieux parmi les grands acheteurs de cacao.

Même les observateurs critiques que nous avons interrogés directement (ONG humanitaires et environnementales notamment) hésitent à parler nommément de telle ou telle entreprise, arguant que cela pourrait mettre à mal les timides initiatives lancées sur le terrain. Nous avons cependant tenté d'en savoir plus au travers d'une enquête, adressée directement aux entreprises concernées.

 
L’enquete

 
Objectif de cette enquête: savoir dans quelle mesure les acheteurs et utilisateurs industriels de cacao, fabricants et distributeurs de chocolat sont des acteurs sociaux, environnementaux responsables et agissants.

Dans un premier temps, nous avons envoyé aux entreprises un questionnaire portant sur divers aspects de leur responsabilité sociale et environnementale :

- ont-elle une politique en la matière, quel en est le contenu, s'applique-t-elle à l'ensemble de la chaîne de production ?

- quels moyens de contrôle les entreprises mettent-elles en place pour vérifier si cette politique est réellement appliquée ?

En matière sociale, c'est bien évidemment l'application des conventions de base de l'OIT qui doivent constituer le minimum requis, et plus particulièrement l'absence de travail forcé des enfants, phénomène très sensible dans le secteur du cacao.

Sur le plan environnemental, l'entreprise responsable doit viser à éviter l'emploi de pesticides et favoriser une culture en sous-bois (à l'ombre) la plus apté à préserver la biodiversité.

Parallèlement au questionnaire, nous avons analysé dans cette optique l'ensemble des publications officielles de ces entreprises et nous avons confronté les données recueillies

avec le point de vue des observateurs critiques. Enfin, au travers des réponses reçues et des informations récoltées, nous avons évalué la volonté de transparence de chaque entreprise à l'égard de ces matières

 
Les évaluations sont rassemblées dans le tableau suivant :


 

Comment dites-vous ? Ethique ?

 La présence majoritaire d'appréciations " E " dans le tableau, dénote souvent le manque de transparence d'entreprises qui ne publient pratiquement rien en matière de responsabilité

sociale et environnementale et qui refusent de collaborer à des enquêtes de ce type. Pourtant, plus de la moitié de la production mondiale de cacao émane de pays où le travail des enfants est répandu. Si des entreprises mettaient réellement en place des systèmes permettant d'éviter le phénomène, elles seraient très heureuses de pouvoir le communiquer.

Leur silence en la matière est donc suspect et appelle à une pression des consommateurs pour un meilleur contrôle et une plus grande traçabilité dans la filière du cacao. La stratégie consistant à s'en remettre à une communication collective au travers d'organisations professionnelles comme Caobisco ( qui rassemble et représente notamment les industries de la chocolaterie en Europe) n'est visiblement qu'une autre façon de masquer la réalité. Seules les organisations impliquées dans le commerce équitable ( Oxfam Magasins du Monde) ont intégré des programmes de soutien et de contrôle aux stades les plus critiques de la chaîne de production. On notera cependant les efforts (annoncés) de Nestlé pour disposer d'une politique sociale et environnementale responsable. Reste à voir si elle se traduira dans les faits.

Kraft et Barry Callebaut, deux autres géants du marché mondial' mènent de petits projets pour aider des producteurs à cultiver et récolter le cacao en intégrant des méthodes saines de lutte contre les parasites. Nous déplorons cependant que des entreprises aussi influentes dans le secteur en fassent aussi peu sur le plan éthique.

Les autres entreprises représentées dans cette enquête sont soit inactives soit totalement opaques en matière sociale et environnementale.

 

Un achat responsable

 
Les industriels du cacao et vendeurs de chocolat sont visiblement plus habitués à communiquer sur les aspects attirants de leurs produits que sur la façon dont leurs ingrédients sont cultivés.

En tant que consommateur, privilégier les chocolats de marques qui font plus d'efforts que les autres en la matière est une façon d'exercer une pression sur le marché. Oxfam

Magasins du monde (marques Oxfam et Equita, aussi vendues chez Carrefour et Colruyt) est l'enseigne qui offre le plus de garanties dans le domaine, même si elle doit encore améliorer ses performances en matière environnementale.

Le surcoût relatif de ces produits par rapport à d'autres semble d'ailleurs très négligeable au regard de l'impact sur place : meilleur prix payé aux cultivateurs leur permettant d'éviter la spirale de la pauvreté et avec elle le travail forcé des enfants, cultures plus respectueuses de l'environnement et de la biodiversité. Cela dit, même plus cher que certaines grandes marques, ce chocolat n'atteint pas le niveau de prix d'une marque comme NewTree par exemple.

Pour ceux qui préfèrent les marques plus connues, Nestlé semble le choix le plus éthique à l 'heure actuelle. Mais cela demandera confirmation. D'autres marques vendues en Belgique ont aussi dans leur gamme un chocolat équitable : Galler ou Delhaize, par exemple.

Enfin, la quinzaine du commerce équitable, qui a lieu en Belgique en ce début d'octobre, donnera aussi l'occasion, à ceux qui le souhaitent, de faire un geste.

 

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1 septembre 2005 4 01 /09 /septembre /2005 00:00
"Riches et pauvres, nord et sud, est ou ouest, tous les pays sont à la fois responsables et victimes de la destruction du milieu naturel" 
(G. RUFFOLO)

Dans la démarche qui sous-tend ce site, il m'a semblé primordial de consacrer un chapitre entier, et bien différencié, à l'écologie dans son sens le plus large. L'édification du monde de demain, pour et par nos enfants, et à travers les valeurs que nous leur transmettons. Les questions soulevées ici ont donc une importance vitale pour notre avenir personnel, celui de nos enfants, celui de l'espèce humaine et celui de notre planète.

Mon propos est donc clairement de sensibiliser et de responsabiliser les enfants (et donc nous, leurs parents, en premier lieu), à tout ce qui touche à l'environnement, aux droits de l'homme et de l'enfant, à la consommation saine, raisonnée et éthique, au développement durable etc ... bref, à un certain humanisme, et à une certaine vision à long terme de la gestion de nos ressources et de la portée de nos choix d'aujourd'hui, tant en matière écologique qu'en matière sociale.
C'est ce que j'appelle la Vie Verte.

Qu'est-ce que la Vie Verte ?

C'est une vie qui tente, au milieu d'une société malade de ses peurs, de ses excès, de son avidité et de sa léthargie, de retrouver ses racines, sa richesse, sa simplicité, sa saveur, sa douceur d'être ...
C'est un mode de vie et de pensée qui essaye de respecter son entourage et son milieu, d'écouter son corps et de lui faire la vie douce, d'ouvrir son âme au son de la terre, et d'œuvrer à l'édification d'un avenir meilleur, tout cela par la prise de conscience de notre responsabilité individuelle dans le devenir de notre monde et dans notre devenir personnel.

Merci de vous attarder parfois à penser au monde que nous préparons à nos descendants, et à tout ce que nous pourrions faire pour le rendre, sinon plus accueillant, du moins pas trop inhospitalier ...

Parce que le monde dans lequel nous vivons est celui que NOUS bâtissons. 

Françoise Jeurissen - Tinuviel
Mai 2004

 
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1 septembre 2005 4 01 /09 /septembre /2005 00:00

Main basse sur les produits bio

A l’heure où de grosses firmes et la grande distribution l’investissent, la bio survivra-t-elle ? Une des conséquences de la crise de la « vache folle » est l’essor de l’agriculture biologique (AB) ; la demande des consommateurs n’a jamais été aussi forte. Les grandes surfaces ouvrent de plus en plus leurs rayons aux produits bio. Les boutiques, supérettes et supermarchés bio (du moins s’autoproclamant tels) poussent comme des champignons. Désormais subventionnée et de moins en moins marginalisée, l’agriculture biologique n’est, pour beaucoup d’opportunistes, qu’une niche de marché, juteuse, à exploiter. Face aux industriels qui tentent de s’en emparer, une incertitude sourd : quelles seront les orientations choisies par la bio ?

Par Chantal Le Noallec
Présidente de l’association Union des consommateurs de la Bio (UCBio).


Acheter bio, c’est, en principe, participer au développement d’une agriculture source de vie et lutter contre le saccage de l’environnement ; c’est refuser la consommation à outrance, respecter les animaux, protéger sa santé ; c’est aussi résister à la laideur envahissante, être responsable de ses choix dans un domaine encore relativement préservé, c’est une forme de liberté, un espoir. C’est combattre pour le futur du monde.

Ainsi, au printemps 1998, on pouvait acheter dans plusieurs biocoops (1) de Bretagne des yaourts Grandeur Nature. Or, sous cette marque distribuée par la laiterie Le Gall, dont le nom seul figurait sur l’emballage, se cachait la firme Even, géant de l’industrie agroalimentaire bretonne et fournisseur de pesticides.

Autre exemple significatif : les yaourts de la marque Bio d’Armor, en vente dans les hypermarchés Géant, sont aussi vendus sous une autre étiquette : Grandeur Nature, dans les biocoops. Seule différence : l’emballage et le prix. Quant à l’entreprise bretonne Triballat, elle fabrique des laitages bio sous les marques Vrai, pour la grande distribution, et Les Fromagers de tradition, pour le commerce spécialisé. Mais le nom de Triballat ne figure pas sur les seconds ! C’est aussi le cas de Distriborg, qui distribue la même gamme bio sous les marques Bjorg et Evernat. Où se trouve le choix pour le consommateur, s’il n’est pas informé ?

Vendre ces articles, produits ou distribués dans certains cas par des sociétés dont les buts sont, en premier lieu, lucratifs, ne va guère dans le sens de la bio. « Souhaitons-nous vraiment cautionner une telle évolution par nos achats ? », interroge le rédacteur d’une revue de jardinage bio, Antoine Bosse-Platière (2).

Derrière ces marques-écrans se profile le risque de l’industrialisation de la bio, car la filière agroalimentaire mise de plus en plus sur cette agriculture. Les conversions fleurissent, et l’on voit apparaître une bio-industrie avec des monocultures ou des monoélevages. Plus grave, de nombreux opérateurs font pression pour obtenir un allègement des cahiers des charges sous prétexte d’accélérer les conversions et de pouvoir fournir davantage de produits à des prix toujours plus bas. Bio à moindre coût, standardisée, bas de gamme, est-ce là son avenir ?

« Il faut ouvrir la bio aux revenus plus modestes. » Ainsi s’expriment nombre d’acteurs de la bio. Sous cette intention, louable et souhaitable, perce une mauvaise conscience face au reproche d’élitisme. Même Carrefour s’est engagé à « rendre plus accessible la consommation des produits biologiques ». D’où une pression sur les prix, suivant en cela le système néolibéral qui a conduit l’agriculture conventionnelle à son impasse. Casser les prix signifie diminution de la main-d’oeuvre et des salaires, augmentation du rendement, et ouvre la voie à une agriculture bio-intensive et à une bio-industrie, avec, pour corollaire, la disparition des petites structures.
Une information manipulée

A l’inverse, une juste rémunération du producteur et du transformateur, en relation avec la qualité du travail et du produit, est la seule façon pour que les petites et moyennes entreprises continuent de vivre en toute indépendance. Dans la foulée, il y aura création d’emplois et davantage de gens pour acheter bio. Sinon, il faudra inventer d’autres garanties, un autre label, d’autres lieux d’achat. Quant au prix « excessif » de la bio, c’est un faux problème dès lors que l’on tient compte des coûts des produits conventionnels en termes de santé, dépollutions ou subventions.

Un autre exemple de l’industrialisation de la bio est lié à des dérogations grâce auxquelles des ingrédients non bio, parfois douteux, peuvent être introduits à hauteur de 5 %. A présent, sont souvent ajoutés des épaississants-gélifiants - carraghénanes, farines de guar ou de caroube, gomme xanthanne -, tous rétenteurs d’eau utilisés dans l’alimentation industrielle, dont l’effet sur la santé est loin d’être jugé inoffensif (3).

En outre, dans de nombreux commerces, sont vendus depuis des mois des chocolats et gâteaux où la lécithine n’est pas toujours bio, donc sans garantie sur l’origine du soja : est-il transgénique ou non ? En réponse aux questions, il est avancé comme argument que ces articles ont le logo AB (4), qu’il n’y a pas suffisamment de lécithine de soja bio et donc que de la lécithine non bio peut être utilisée au titre des 5 % de dérogations autorisées. De toute façon, ces produits sont référencés, voire agréés Biocoop (5), et il n’y a aucune raison de les retirer des rayons. Ou bien on explique qu’avec le temps le fournisseur évoluera vers le « bio à 100 % ».

Il ne suffit pas de crier haro sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) et, parmi eux, le maïs de Novartis. La seule cohérence serait le boycottage. Sinon, on abuse de la crédulité de beaucoup de clients qui achètent sans lire les étiquettes, font confiance au logo AB, et croient parfois que toutes les marchandises vendues sont « bio à 100 % » et donc sans risque d’OGM. Au reste, cet additif de l’industrie agroalimentaire est- il indispensable ?

Qui plus est, derrière les produits bio à base de soja de la marque Soy, fabriqués par la société Nutrition et Soja et vendus dans un grand nombre de magasins bio de France, il y a Novartis, multinationale pharmaco-agrochimique planétaire dont le maïs transgénique « antipyrale » est cultivé en France depuis le printemps 1998. Vendre ou acheter Soy, c’est donc participer à l’expansion de Novartis et encourager ce genre d’agriculture, et, au-delà, un certain type de civilisation. Or cette information est étouffée par Biocoop et une partie du milieu bio-écolo pour, disent-ils, « ne pas semer la panique dans les rangs des consommateurs ».

En effet, Biocoop a décidé d’agréer la maison Soy dès octobre 1996 tout en sachant qu’elle appartenait depuis des années à Sandoz, autre géant de la chimie et des semences, « pollueur du Rhin » - se rappeler l’accident survenu aux usines Sandoz de Bâle, le 31 octobre 1986, où des tonnes d’insecticides et de fongicides à base de mercure ont été déversées dans le fleuve -, qui a aussi racheté la marque Céréal ; il a fallu attendre début 1998 pour apprendre le prétendu « cas de conscience » posé par cette décision, selon les termes de la revue Consom’action éditée par la confédération Biocoop. Depuis, nulle trace de la fusion Sandoz-Ciba-Geigy, qui a donné naissance à Novartis en avril 1997, pas même dans la fiche d’agrément Soy du 17 mars 1998.

Afin de justifier cet agrément, Biocoop use de tous les arguments, comme dans cette réponse de juin 1998 aux interrogations d’une consommatrice : « Nous nous retrouvons donc dans la situation où une entreprise appartenant au groupe leader en France sur les OGM collabore avec la filière bio pour la mise en place d’un protocole de traçabilité afin de garantir valablement l’absence d’OGM. » Collaborer avec Novartis pour « protéger les semences de soja » à l’avenir, voilà deux propositions difficilement conciliables ! Même l’information est manipulée : « Soy est actuellement le seul opérateur de la filière à transformer en priorité du soja bio français ; tous les autres transformateurs travaillent avec du soja importé des Etats-Unis ou du Canada (fiche du 17 mars 1998) ».

Affirmation fausse : la scop Tofoulie, dans la Drôme provençale, créée en 1991, a toujours transformé uniquement du soja bio français, alors que Soy utilise aussi du soja non bio (25 % de l’approvisionnement total) et du soja bio étranger (7,5 %) (6). D’où les risques d’OGM par contamination. Enfin, le soja est loin de représenter à lui seul l’ensemble de ces « légumineuses si précieuses pour la rotation des cultures ». Quant à l’« éthique », elle ne pèse pas lourd face au business : « Si l’on arrête de vendre Soy, comment remplir les rayons ? »

A l’évidence, Novartis a trouvé en Soy une clé qui lui ouvre les portes du marché de la bio et lui permet de capter plus ou moins directement dans sa sphère d’influence les producteurs de soja du Sud-Ouest qui cultivent aussi des céréales, et d’autres fournisseurs bio de Soy (Markal, Celnat, Hervé, Lima, Petite, Viver, etc.), les distributeurs (Biocoop, Distriborg, etc.) et les consommateurs. Pour l’instant, la bio sert déjà d’alibi et d’image de marque au « capitalisme écologique » de Novartis.

On parle déjà de bio-industrie, faisant ainsi allusion à la fois à l’industrialisation de la bio et à cette colossale industrialisation du vivant que pourrait devenir la révolution biotechnologique émergente (7), ambiguïté facilement exploitable. Comment peut-on engager de la sorte sa responsabilité face à l’avenir de la bio et croire être de taille à lutter contre une multinationale dont les buts sont la maximalisation des profits et l’expansion illimitée, mais certainement pas le respect de la nature (8) ? En fait, à trop vouloir « sauver le soja », on omet le principal, qui est la survie de l’agriculture biologique dans le monde transgénique qui se dessine.

Pour résister à la récupération par les agro-industriels, la bio n’a-t-elle d’autre voie que de se placer sur leur terrain (concurrence, productivisme, course au profit, etc.) et d’accepter les modèles et les comportements qu’elle a longtemps rejetés au risque de perdre sa spécificité ? L’« éthique » n’est plus souvent qu’un argument publicitaire sans lien avec la réalité : « transparence, qualité, convivialité, écologie, bio, consom’action », etc., ces mots deviennent les slogans d’une langue de bois adoptée par de nombreux professionnels de la bio - de la distribution, notamment - qui se transforment en techniciens du marketing. Concentration des entreprises, prolifération des produits anonymes et des marques de distributeurs, bio-business, ces tendances se généralisent, si bien qu’elles se banalisent et que le milieu bio et écologique tolère désormais des compromissions impensables autrefois. Il y a de moins en moins d’entreprises bio indépendantes. Au- delà, c’est l’autonomie de l’agriculture biologique qui est remise en cause. Une solution serait dans une « agriculture biologique autarcique (9) » retournant à ce qu’elle souhaitait être à l’origine : une agriculture locale, respectueuse de l’environnement, qui préserverait les petites exploitations et restaurerait les espaces ruraux désertés, qui permettrait aussi la rencontre entre consommateur et producteur.

Les dérives présentes d’une fraction de la bio mettent celle-ci en péril. Alors que des sociétés tentaculaires la convoitent, il est urgent que les consommateurs de la bio fassent leur choix : être les simples témoins, voire les complices, de ce qui se prépare, ou bien aller dans le sens de la qualité de la vie et de la bio. Cela passera par la remise en question de ces comportements de consom’acteurs ou d’éco-consommateurs, de mode actuellement (10), et par l’analyse de cette notion de « développement durable (11) » où l’on essaie d’enfermer l’agriculture biologique, développement qui est toujours le même, quel que soit l’adjectif qu’on lui accole.

Il s’agit d’un choix de civilisation car il s’inscrit au coeur d’un débat dont l’issue engagera notre façon de nous nourrir, notre santé, notre façon de percevoir l’univers et de penser.

Chantal Le Noallec.


(1) La confédération Biocoop, créée en 1987, est un réseau de distribution de produits bio regroupant quelque 180 biocoops qui affirment pratiquer autrement la relation avec le consommateur et le producteur.

(2) « Où acheter bio demain ? », Les Quatre Saisons du jardinage, no 110, Editions Terre vivante, mai-juin 1998.

(3) Fabien Perucca et Gérard Pouradier, Des poubelles dans nos assiettes, Michel Lafon, Paris, 1996.

(4) L’agriculture biologique est un mode de production agricole exempt de produits chimiques de synthèse et soumis au contrôle d’un des organismes certificateurs agréés par le ministère de l’agriculture. Un produit bio donne droit, après certification attestant sa conformité aux normes de l’agriculture biologique, à la mention obligatoire « produit de l’AB » ou « produit issu de l’AB » et, facultativement, au logo vert et blanc AB, qui est la propriété du ministère de l’agriculture.

(5) L’agrément Biocoop est accordé aux fournisseurs bio qui en font la demande dès lors qu’ils répondent aux exigences suivantes : indépendance, soutien de la production bio, réduction des intermédiaires, information sur l’origine des approvisionnements. Une fiche d’agrément est alors rédigée par le service produits Biocoop. Ce document, consultable par les consommateurs, donne divers renseignements sur le fournisseur agréé : structure de l’entreprise, politique d’approvisionnement et de distribution, etc.

(6) Cf. la fiche d’agrément Soy du 17 mars 1998.

(7) Lire Jeremy Rifkin, Le Siècle biotech ; le commerce des gènes dans le meilleur des mondes, La Découverte, Paris, 1998.

(8) Voir Dorothée Benoît-Browaeys et Pierre-Henri Gouyon. « Faut-il avoir peur des aliments transgéniques ? », Le Monde diplomatique, mai 1998.

(9) Cf. l’éditorial de Nature & Progrès, mai-juin 1998.

(10) Lire Raoul Vaneigem, Nous qui désirons sans fin, Le Cherche Midi, Paris, 1996. L’auteur fait une analyse du consommateur éclairé qui, argumentant sur la qualité des cassoulets et des réfrigérateurs, et s’inquiétant de nuisances écologiques, sauve un marché concentrationnaire, mais parodie l’être humain qu’il tarde à devenir.

(11) Lire Bernard Charbonneau : une vie entière à dénoncer la grande imposture, Erès, Ramonville-Saint-Agne, 1997. Cet ouvrage collectif est consacré à Bernard Charbonneau (1910-1996), qui, toute sa vie, dénonça « la dictature de l’économie », « le mensonge de la technoscience » et « les errances de l’écologie politique ». Voir en particulier le texte de Serge Latouche, « Le développement, une imposture durable ».

LE MONDE DIPLOMATIQUE | mars 1999 | Page 27
http://www.monde-diplomatique.fr/1999/03/LE_NOALLEC/11755

 
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